[ Coproduction | Création ]

passager clandestin

d’après the great disaster de Patrick Kermann
mise en scène Sylvie Osman

avec Fanny Fezans, Antoine Formica, Laurent Robert, Jean-Baptiste Saunier dramaturgie Didier Plassard scénographie et fabrication des marionnettes Greta Bruggeman décor Damien Visocchi lumière Pierre Olivier production Compagnie Arketal coproduction Théâtre National de Nice - CDN Nice Côte d’Azur, Théâtre Joliette-Minoterie - Scène conventionnée pour les expressions contemporaines - Marseille résidences Théâtre de la Licorne - Cannes, La Louhenrie - Pouillé, L’Apostrophe - SN Cergy-Pontoise avec le soutien du Festival Mondial des Théâtres de Marionnettes - Charleville-Mézières, de la Ville de Cannes, du Théâtre Roublot, de la Compagnie du Pilier des Anges - Fontenay-sous-Bois, du Forum Jacques Prévert - Carros, du Fonds d’Insertion pour Jeunes Artistes Dramatiques, de la DRAC PACA, de la Région PACA et du Département des Alpes-Maritimes. La compagnie Arketal est conventionnée par la DRAC PACA et la Ville de Cannes. Elle est subventionnée par la Région PACA et le Département des Alpes-Maritimes. texte publié aux Éditions Lansman

Une tragédie humaine transcendée par la beauté et la sobriété esthétique d’un travail de marionnettes signé Arketal. Un conte universel qui nous touche au cœur.

Un berger italien, Giovanni Pastore, quitte ses montagnes pour chercher du travail, rêvant d’une vie meilleure. À bord du Titanic, il est chargé de laver les 3177 cuillères à dessert destinées aux premières classes. Passager clandestin, il ne montera pas dans les canots de sauvetage et mourra englouti dans les flots de l’Atlantique. Il revient du fond de l’océan pour nous conter son histoire. Parmi les décombres ressurgissent ses compagnons d’exil, l’ingénieur du paquebot, le capitaine ou encore sa mère qui le visite dans un songe.
Le texte haletant de Patrick Kermann nous fait revivre le naufrage du Titanic et un quatuor de marionnettistes dirigé par Sylvie Osman donne vie à des personnages bouleversants. Manipulé par trois acteurs selon la technique japonaise du bunraku, Giovanni Pastore apparaît sous les traits d’une marionnette animée par les voix de ses interprètes. Il est ce berger, ce naufragé, il est aussi chacun de nous, évoquant l’Europe d’hier et d’aujourd’hui, tandis que le Titanic devient une figurine de papier chargée de symboles.

Rencontre avec l’équipe artistique à l’issue de la représentation du jeudi 29 mars.

entretien Sylvie Osman

Propos recueillis par Caroline Audibert

“Un dialogue très expressif se crée alors entre le corps vivant et le corps inerte de la marionnette, un dialogue qui dépasse la mort des choses.”



Comment s’est construite l’esthétique singulière de ce spectacle ?

Après une formation à l’Institut International de la Marionnette de Charleville-Mézières, la scénographe Greta Bruggeman et moi-même avons été engagées par un grand marionnettiste, le Suédois Michael Meschke qui nous a initiées à l’art des marionnettes bunraku. Dans Passager clandestin, notre esthétique s’est également inspirée des plasticiens et artistes peintres du début du XXe siècle, notamment Fernand Léger et les avant-gardes. J’utilise des musiques “bruitistes” de cette époque et nous menons, avec Pierre Olivier, une recherche très poussée sur les lumières puisque les acteurs sont à vue dans un espace ouvert.

En tant que marionnettiste, vous inscrivez-vous dans la pure tradition du théâtre japonais du bunraku ?

Dans le bunraku, trois acteurs bougent avec la même marionnette. L’interprète principal en tient le corps et l’une des mains en bois ou en tissu, un autre manipule l’autre main et un troisième fait bouger les pieds. J’ai utilisé ces codes mais j’ai demandé à mes acteurs de glisser leurs propres mains dans le prolongement de la marionnette. Un dialogue très expressif se crée alors entre le corps vivant et le corps inerte de la marionnette, un dialogue qui dépasse la mort des choses. À cela, j’ai ajouté les différentes voix des interprètes. La marionnette se remplit plus encore d’humanité. Cette gestuelle particulière et ce travail polyphonique ont été possibles grâce aux acteurs que j’ai formés à l’École Régionale d’Acteurs de Cannes.

À vos yeux, Giovanni Pastore, ce berger qui va s’embarquer sur le Titanic, est une figure-monde. Qu’entendez-vous par là ?

Ce personnage singulier quitte ses montagnes italiennes du Frioul pour prendre la route de l’Europe, en quête de travail et d’un paradis sur terre. Il symbolise tous ceux qui, à un moment donné, quittent leur pays, leur ville, leur famille, dans l’espoir de bâtir une meilleure vie. Et ce qui m’intéresse plus que tout, c’est que Giovanni Pastore vienne se heurter à la grande Histoire. À travers son destin, c’est l’histoire du XXe siècle qui ressurgit, avec l’idéal du progrès technique, les classes populaires, les inégalités sociales… Son destin singulier devient un destin collectif. J’en ai fait une marionnette habitée par plusieurs voix, plusieurs énergies, qui peut représenter chacun de nous.

Les autres personnages de la pièce sont-ils eux aussi représentés par des marionnettes ?

Après le naufrage, Giovanni Pastore va remonter du fond de l’océan pour raconter son histoire, il porte des objets avec lesquels nous construisons le décor et les autres marionnettes. Il y a sa mère, qui lui apparaît comme un songe autour de lui, ou encore l’ingénieur désespéré du bateau, Thomas Andrews…

Il s’agit d’un récit très singulier du naufrage du Titanic ?

Oui, Patrick Kermann a écrit un monologue sans ponctuation, en mélangeant le réel et la fiction. C’est une dramaturgie de la mémoire, d’une mémoire qui vient dans le désordre ! On passe donc par le récit de sa traversée de l’Europe, les impressions de voyage, des souvenirs d’enfance, des événements historiques… L’écriture de Kermann possède une rythmique incroyable que j’interprète de manière polyphonique. Pour moi, les quatre acteurs sont une part de Giovanni et mettent en valeur cette destinée collective qui le traverse.

Le regard que porte le personnage a-t-il une dimension critique sur son époque, et notamment sur le progrès ?

Oui, il y a une forme de critique du progrès qui devient une utopie qui coule au fond de la mer. Sur le Titanic, il n’y avait pas assez de canots et c’est un signe fort ! Des hommes et des femmes de troisième classe sont morts en grand nombre. Cette pièce raconte une histoire sociale, “celle d’un monde de chiffres et d’hommes-objets” comme le dit mon dramaturge Didier Plassard, celle d’un monde moderne, technique, parfois inhumain. Giovanni Pastore se confie et nous partageons un regard vécu dans un théâtre de la mémoire et du présent.
saison 2017-18
passager clandestin au Théâtre National de Nice
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