jeu & manipulation Ézéquiel Garcia-Romeu, Iroslav Petkov, Christo Ivanov, Margarita Kostova, Teodora Rashed, Plamen Kanev [en alternance] construction des marionnettes Martine Le Saout dramaturgie & regard extérieur Laurent Caillon création sonore Stéphane Morisse composition originale René Koering dessins & peintures Ézéquiel Garcia-Romeu manipulation machinerie Thierry Hett arts numériques & nouvelles technologies Pierre Gotab, Benjamin Maza - Nectar de Code assistante stagiaire à la scénographie Odile Artru assistante stagiaire à la scénographie et à la construction des marionnettes Ana Almeida assistant vidéaste Philippe Rombeault assistante ateliers d'écriture Victoire Ponza production Frédéric Poty assistant Bulgarie Theodore Vodenitcharov production Théâtre de la Massue - Cie Ézéquiel Garcia-Romeu coproduction Théâtre National de Nice - CDN Nice Côte d’Azur, Théâtre Nouvelle Génération - CDN de Lyon, Théâtre Sénart - SN, Le Carré - SN de Château-Gontier, Théâtre National des Marionnettes de Vidin - Bulgarie, Plovdiv Capitale Européenne de la Culture - Bulgarie, ExtraPôle Région SUD avec le soutien de l’Institut Français, de Nectar de Code - Carpentras, de La Gare Franche - Marseille, du Mouffetard - Paris, de l’Université de Nice-Sophia Antipolis, de l’ENSATT - Lyon, de l’Université Janacek - Brno, de la French Tech Culture - Avignon, de La Chartreuse - Villeneuve lez Avignon et de la SPEDIDAM.
LA SPEDIDAM est une société de perception et de distribution qui gère les droits des artistes interprètes en matière d’enregistrement, de diffusion et de réutilisation des prestations enregistrées.
En compagnie de ses extraordinaires créations, le magicien de la marionnette Ézéquiel Garcia-Romeu poursuit son exploration poétique d’une société à la dérive dans un territoire surveillé et robotisé.
« Une réflexion marionnettique sur notre incapacité à construire un monde meilleur. »
Journal La Terrasse
SPECTACLE DIRECTEMENT ACCESSIBLE AU PUBLIC SOURD OU MALENTENDANT.
INFORMATIONS ATELIER ÉCRITURE & ATELIER ARGILE. En savoir plus
Interview Ézéquiel Garcia-Romeu
Propos recueillis par Caroline AudibertOPUS 2 est la suite de l’exploration que vous avez menée l’année dernière. Autour de quelles thématiques tourne ce nouveau spectacle ?
Le grand thème, ce sont les hommes au travail dans des conditions difficiles. Un territoire robotisé, surexploité, traversé par ces petits êtres fragiles qui tentent tant bien que mal de survivre, soumis à la mécanique du travail et placés sous surveillance. Une surveillance qui a toujours existé, sous différentes formes par le passé et qui, aujourd’hui, s’appuie sur les ordinateurs.Quel dispositif scénique avez-vous choisi pour exprimer cette omniprésence de la surveillance ?
Nous avons disposé dans la scénographie des caméras vidéo, des barrières de contrôle et surtout une surveillance satellitaire représentée par un jeu vidéo que nous avons conçu avec l’entreprise « Nectar de code ». C’est un jeu de stratégies politiques basé sur des rapports de force. Le but ? S’approprier des biens matériels (richesses minérales, énergies…) pour les transformer en biens financiers et en faire le commerce. Le jeu vidéo aborde la finance, le cours en bourse des minerais, de charbon, de pétrole ou autre ressource, l’exploitation du terrain…, la mise en place d’un commerce international.Vous proposez au spectateur de devenir un joueur ? C’est assez inédit dans l’univers de la marionnette, et même théâtral….
Pour extraire une valeur d’un terrain, le spectateur se rend sur le territoire, la cartographie, le radiographie, en prend possession. Le joueur va-t-il exproprier des personnages qui habitent là ? Va-t-il faire des trous dans le décor pour sonder les sous-sols ? L’originalité, c’est qu’il y a une dimension physique, réelle, du jeu virtuel. Des médiateurs seront présents pour tempérer la situation, sans quoi le décor n’existerait plus au bout de la première journée ! Cette interaction entre le virtuel et la réalité du décor, c’est une première mondiale, une idée très novatrice selon les fabricants de jeux vidéo. C’est une véritable expérience qui est proposée ici, et c’est intéressant de voir que les idées les plus osées peuvent venir du monde le plus artisanal !Vous déjouez les codes de la dramaturgie classique en invitant les spectateurs à déambuler autour de votre installation ?
Absolument, les spectateurs peuvent se répartir librement tout autour du décor et déambuler, voir le spectacle sous différents angles, et peut-être même prendre des choses en main. Je voudrais le jouer sur 3 heures, en permettant au spectateur de n’assister qu’à 15 minutes ou à une heure, ou de rester sur la totalité s’il a du temps. Ce projet s’apparente à une performance artistique autour de la marionnette et du jeu vidéo, ce qui donne une distance juste pour laisser libre interprétation au spectateur. C’est une production modulable qui joue beaucoup sur la mise en place d’un univers en constante évolution. Sur un décor en bois de 12 x 5 mètres, les petits personnages évoluent, animés par des performeurs. Il y a aussi quelques animaux (chiens, chats…), et des éléments naturels comme de la glace, du charbon, de l’huile…, qui nous raconteront leur propre histoire et leur métamorphose au cours du temps. Parmi ces mécaniques physiques, on a ces petits personnages qui louvoient, qui survivent, qui surmontent les obstacles. C’est l’assemblage de ces divers éléments qui vont créer le rêve. J’intègre aussi toujours une bibliothèque, un ensemble de livres miniatures que les spectateurs peuvent consulter et qui s’enrichit des biographies des personnages à mesure qu’elles évoluent. Ce sont des personnages vivants et non figés dans le temps.Dans cette nouvelle création métaphorique de notre condition, deux mondes semblent s’affronter. Sont-ils compatibles ?
En effet, le monde de l’artisanat, celui de nos connaissances, de nos mains, de nos corps, affronte le monde de l’intelligence artificielle. Deux mondes, deux espace-temps différents. Je les réunis dans le spectacle : un artisanat d’art fabriqué à la fois par des artistes et de l’ingénierie hi-tech et numérique. Il est possible à mon sens de réunir les deux mondes dans le réel. Ce spectacle invite à se poser la question de savoir dans quel monde nous vivons et comment nous vivons le partage des savoirs et des richesses. En tant qu’artiste, j’ai la responsabilité de la transformer en métaphore, en poésie, en joie. Avec les spectateurs comme dans le processus créatif, en réunissant une communauté de chercheurs, d’ingénieurs, d’artistes… Produire une expérience commune comme celle-ci est une action très enrichissante et très positive qui répond déjà à la question posée par le spectacle !Les enjeux de votre création sont politiques et écologiques : comment va-t-on habiter la terre, se partager les ressources, faire face à l’épuisement des ressources ? Amenez-vous une vision réaliste, optimiste ?
Je prendrai l’exemple de ce projet qui m’a permis de fédérer des gens totalement différents. Le fait de voir ces équipes au travail avec une grande capacité d’échanges, d’ouverture est très enthousiasmant. Au fond, cela veut dire qu’on est arrivé à un tel point d’inquiétude au sujet de l’avenir du vivant et de notre avenir que cela génère une cohésion dans divers groupes de société. Dans la première version de ce spectacle joué en Bulgarie, les gens sortaient de l’expérience très émus, transformés, avec cette envie de participer à cette transformation du monde.Quelles sont vos armes d’artiste face au risque jamais écarté du totalitarisme, qui imprègne vos OPUS ?
La poésie, la délicatesse et l’humour sont au cœur de mon approche. Ils se dégagent des personnages eux-mêmes. A un moment de leur vie, ces derniers traversent la souffrance, mais ils sont dans un état poétique très beau. Et cette poésie permet au spectateur d’adhérer à mon projet. Dans le contexte d’un essoufflement de notre civilisation, mon discours est métaphorique, il est celui d’un artiste et d’un poète et non d’un homme politique. A travers ces créatures nées de mon imaginaire, la pensée se transforme en symbole, en archétype qui peut devenir source d’inspiration.Pour évoquer votre approche artisanale, comment façonnez-vous vos marionnettes ?
Je commence par esquisser mes personnages au dessin, à la peinture, puis je les sculpte dans l’argile. Quand ma recherche est suffisamment aboutie, je réalise la poupée. Je fais un moule en plâtre, puis je travaille encore le plâtre. Je réalise ensuite un moule en silicone, puis j’effectue un tirage en latex et je le mécanise de manière à ce qu’il soit quasiment autonome dans une position statique, qu’il prenne ainsi vie. Cette approche me permet d’avoir une économie de moyen dans ce que le personnage va transmettre et démontrer comme illusion de vie. Mais il peut arriver que certaines marionnettes n’arrivent pas à exister, qu’il y ait des résistances, qu’elles ne montent jamais sur scène. Ce sont les castings ratés !Qu’est-ce qui fait qu’une poupée est retenue pour le « rôle » ?
C’est sa capacité à représenter le vivant, sa capacité à donner la sensation que le personnage a une profondeur, un passé, qu’il devient un être vivant à part entière, avec une biographie qui lui est propre, qu’il porte dans ses traits, sa composition physique…Chaque marionnette nécessite combien de performeurs pour prendre vie ?
Les statuettes que je crée sont très expressives même immobiles. Il suffit de les animer un peu pour qu’elles prennent vie. Bien souvent la tête de la poupée est séparée du corps, les bras et les jambes sont raccrochés par des articulations qu’il faut animer séparément. Les poupées que je conçois sont réalisées en une pièce et le système d’articulation descend depuis la tête jusque dans la jambe. C’est l’ensemble du personnage qui bouge dans son économie propre, manipulé par un seul performeur. Une méthode expérimentale que j’ai mise au point au fil des ans.Certaines traditions de l’art de la marionnette vous ont-elles encouragé sur cette voie ?
Dans la tradition japonaise, le marionnettiste a une prise directe avec la poupée au niveau du milieu du corps : une tige passe à l’intérieur et articule la tête. Le maître manipule la tête tandis que deux disciples, vêtus de noir et masqués par des cagoules, animent chacun un bras et une jambe d’un côté de la poupée. Ils restent disciples jusqu’à 50 ans ! Je me suis un peu inspiré de cette tradition, mais j’ai modifié le système d’articulation. Comment rendre un corps miniature vivant sans qu’on devine le mécanisme ? C’est là où procède la magie. Ce qui m’a mis sur cette voie vient plus du cinéma d’animation que de la tradition de la marionnette. Et l’idée, c’est aussi d’avoir des personnages très expressif. Je voulais que rien que dans leur posture, ils expriment toute une vie et touchent le spectateur.OPUS 2 est le fruit d’une collaboration entre plusieurs univers, talents, pays. Est-ce nouveau pour vous ?
OPUS 2 est un projet qui dépasse les frontières. Il est réalisé en France avec des partenaires importants. Nous avons également des soutiens en Europe, notamment en Bulgarie, en République Tchèque, mais aussi au Liban et à Cuba. C’est un projet en plusieurs étapes qui évoluera au moins jusqu’en 2020. Nous avons réalisé une première version de ce projet en Bulgarie avec le théâtre national de marionnettes de Vidin, dans le nord de la Bulgarie, avec cinq comédiens marionnettistes qui ont participé à la construction du décor, à la fabrication des marionnettes et aux représentations. Une partie de cette équipe vient nous rejoindre dans la création au Théâtre national de Nice. Cette création au TNN va intégrer les arts vidéo et numériques. C’est un véritable laboratoire.Vous dépassez ici le cadre d’un simple spectacle et faites faire à l’art de la marionnette un bond dans la modernité !
OPUS 2 s’est construit un peu à la manière d’un programme scientifique. Les scientifiques partagent leurs travaux par des publications. Je souhaite mettre à disposition le savoir autour de la marionnette afin qu’il puisse se transmettre, évoluer et progresser. Grâce aux nouvelles technologies, une articulation de marionnettes peut être modélisée en 3D et être reproduite à l’autre bout du globe grâce à la transmission numérique des données. On part de l’artisanat pour aller vers le numérique et l’échange international. La technologie nous permet aussi, tout en restant simples, de fédérer une communauté d’artistes autour de ces savoirs, de les conserver tout en les faisant évoluer. On peut faire des ateliers d’étudiants, des ateliers d’écriture, les perspectives sont nombreuses !Dates de représentation
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